La vie d’Emeritha a complètement changé quand elle avait 10 ans. Peu après le génocide de 1994 contre les Tutsi, sa famille a déménagé en Belgique. 

« Nous nous sommes simplement levés et sommes partis, sans même pouvoir dire au revoir à nos amis. » 

Même si ce fut un défi de déménager à un si jeune âge, les choses en Belgique se passaient bien. « La vie n’était pas mal, j’ai été bien élevée, je mangeais bien, dormais bien et j’ai pu faire des études. » 

« Parce que nous vivions dans une situation de guerre et de traumatisme, nous avions l’impression d’aller dans un endroit formidable, même si nous ne connaissions ni la langue ni personne sur place ». Mais quand on grandit, on commence à penser à d’où on vient, comment on est parti et on a l’impression qu’il y a quelque chose qui manque. » 

Emeritha a poursuivi ses études assidument et est allée à l’école d’infirmerie où elle s’est spécialisée en santé mentale et en psychiatrie. Elle a approfondi ses études en se spécialisant plus particulièrement dans la psychiatrie ethnique, une psychiatrie visant à comprendre les dimensions ethniques et culturelles liées à la santé mentale. 

Emeritha
Emeritha, membre de la diaspora rwandaise en Beligique, travaille dans la santé mentale et la psychiatrie depuis plus de 10 ans.  
IOM 2023/ Robert Kovacs

« Après avoir fini l’école et commencé à travailler en Belgique, j’avais toujours l’impression qu’il me manquait quelque chose. Je ne me sentais pas chez moi, alors j’ai décidé que d’une manière ou d’une autre, je devais rentrer à la maison. » 

En cherchant des opportunités pour poursuivre son rêve d’aider les gens à surmonter les problèmes de santé mentale, elle est tombée sur Santé Mentale en milieu Ouvert Afrique. Elle a voyagé depuis la Belgique vers le Sénégal, le Mali, la Guinée et la Tanzanie, où elle a pu fournir un soutien à la santé mentale et une aide psychosociale aux personnes dans le besoin lors de quelques courts séjours. 

Après quelque temps, elle a eu connaissance d’un des programmes de l’OIM qui cherchait à faire participer la diaspora rwandaise en Europe spécialisée dans le domaine médical. Elle s’est inscrite au programme et est revenue au Rwanda.  

La première fois que je suis retournée, je m’inquiétais de ne pas pouvoir répondre à leurs attentes. Je m’inquiétais de ne pas me sentir à ma place ou de ne pas comprendre les habitants car je ne parlais pas couramment la langue, mais je sentais dans mes tripes et dans mon cœur que c’est là que je devais être.

Emeritha
Lors de sa dernière visite au Rwanda, Emeritha à travaille dans l’unité pédiatrique de l’hôpital d’enseignement neuropsychiatrique de Ndera. 
IOM 2023/ Robert Kovacs

Lors de sa troisième visite, elle a rencontré une fillette de sept ans qui avait été agressée sexuellement.

« Les enfants communiquent différemment, alors je jouais à des jeux, je dessinais et faisais d’autres activités avec elle qui me permettaient de recueillir des informations. Quand le médecin est revenu, nous avons une discussion et avec lui et la famille de la fillette pour élaborer un plan pour l’aider à se remettre. » 

Pouvoir aider cette fille a donné confiance à Emeritha et l’a rassurée qu’elle était de retour chez elle, là où elle devait être. » 

« Je suis revenue pour chercher quelque chose qui me manquait ; les personnes et les lieux que j’avais quittés, où j’habitais avant, où j’avais l’habitude de jouer. » 

« Je me sentais comme un arbre déraciné et planté ailleurs. Il ne grandit pas de la même manière. Quand il retourne à ses racines, il recommence à pousser, à bourgeonner et à fleurir. »